La filière égyptienne des agrumes, l’une des plus dynamiques au monde, a connu un recul notable lors de la campagne 2024/2025. Selon le média spécialisé Freshplaza, citant des données officielles publiées le 5 novembre, l’Égypte a exporté 2,1 millions de tonnes d’agrumes, contre 2,39 millions lors de la campagne précédente, soit une baisse de 12 %. Cette contre-performance, la première depuis plusieurs années, s’explique principalement par le déclin des ventes d’oranges, produit phare du pays.
Représentant près de 80 % des exportations d’agrumes, les oranges ont particulièrement souffert : entre septembre 2024 et juillet 2025, leurs exportations ont chuté de 15 %, pour atteindre 1,66 million de tonnes. Une baisse d’autant plus significative que l’Égypte figure parmi les tout premiers exportateurs mondiaux de ce fruit, aux côtés de l’Espagne et des États-Unis. Selon les acteurs du secteur, deux facteurs majeurs expliquent cette situation. D’abord, la montée en puissance des activités industrielles liées à la transformation des oranges en jus et concentrés. L’essor de ce segment a entraîné une forte demande en fruits frais, accentuant la concurrence entre transformateurs et exportateurs. « Le recul des volumes d’oranges exportés, de l’ordre de 240 000 tonnes, est directement lié à la consommation d’oranges fraîches par les usines de concentré », explique Eslam Gelila, exportateur égyptien.
Cette tendance avait été anticipée dès le début de la campagne par le département américain de l’Agriculture (USDA), qui prévoyait une hausse de 50 % de l’utilisation industrielle des oranges. Cette progression s’explique par la rentabilité accrue des concentrés d’orange sur le marché mondial et par la mise en service de nouvelles unités de transformation dans le pays. Ensuite, la concurrence accrue des industriels a provoqué un effet domino sur le marché. En réduisant la disponibilité des fruits pour l’exportation, elle a entraîné une flambée des prix à la source. « Pendant la majeure partie de la saison, les prix à l’exportation ont augmenté de 60 à 70 % par rapport à la précédente, et ont même doublé en mars 2025. Les oranges égyptiennes étaient plus chères que les oranges espagnoles sur les rayons européens, une première », souligne M. Gelila.
Cette hausse des prix a eu un impact direct sur la demande, notamment en Europe, principal débouché des agrumes égyptiens. Selon Eurostat, les importations d’oranges égyptiennes dans l’Union européenne ont chuté de 30 % en 2024/2025, provoquant la perte du leadership égyptien sur ce marché stratégique. Malgré cette conjoncture défavorable, la filière demeure optimiste pour la prochaine campagne. Les exportateurs comptent sur une stabilisation des prix des concentrés de jus d’orange au niveau international, qui permettrait de rééquilibrer les flux entre l’industrie et l’export. Avec sa production abondante, sa main-d’œuvre qualifiée et ses investissements croissants dans la logistique, l’Égypte conserve tous les atouts pour rebondir et consolider sa place sur le marché mondial des agrumes, un pilier essentiel de son économie agricole.
