Le groupe TotalEnergies a officiellement sollicité une prolongation de dix ans de sa concession gazière au Mozambique, tout en annonçant une hausse de 4,5 milliards de dollars du coût total de son projet Mozambique LNG. Cette demande, adressée le 24 octobre au président mozambicain Daniel Chapo par le PDG du groupe, Patrick Pouyanné, soulève d’importants enjeux économiques, réglementaires et politiques pour l’État mozambicain.
Suspendu depuis 2021 à la suite des attaques djihadistes dans la province de Cabo Delgado, le projet Mozambique LNG devait initialement coûter 20 milliards de dollars. Son budget révisé atteint désormais 24,5 milliards de dollars, un dépassement que TotalEnergies attribue aux coûts de sécurité, aux retards logistiques et à la flambée des prix des matériaux. Bien que la major n’évoque pas explicitement les droits de douane américains sur l’acier, elle avait déjà averti que ces mesures renchériraient le prix des infrastructures essentielles à la liquéfaction et au transport du gaz.
Dans sa lettre, Patrick Pouyanné plaide pour que la prolongation de la concession du champ Golfinho-Atum permette d’amortir les investissements supplémentaires et de maintenir la rentabilité du projet sur le long terme. Le groupe considère cette extension comme une condition nécessaire pour garantir la viabilité financière de l’opération, dont la production de gaz liquéfié ne devrait plus commencer avant 2029, au lieu de 2024 comme prévu initialement. Mais avant tout redémarrage, plusieurs étapes réglementaires doivent être franchies. Trois institutions mozambicaines sont directement impliquées : le ministère des Ressources minérales et de l’Énergie, le régulateur du secteur pétrolier, chargé d’évaluer la légitimité et la justification des surcoûts et, enfin, le Conseil des ministres, dont l’approbation est indispensable pour toute modification des termes contractuels de production.
Le régulateur prépare actuellement son évaluation des coûts additionnels, sans qu’aucun calendrier précis n’ait encore été communiqué. Cette validation constitue toutefois une condition préalable à la reprise des travaux et à l’approbation du budget révisé par le gouvernement. Sur le terrain, le contexte reste délicat. Malgré le soutien militaire du Rwanda et les efforts de sécurisation de la zone, la province de Cabo Delgado demeure exposée à des attaques sporadiques. TotalEnergies prévoit donc une reprise partielle des activités en “mode confinement”, avec des déplacements limités et des mesures de sécurité renforcées.
Pour le gouvernement mozambicain, ce projet représente un équilibre délicat entre impératifs économiques et prudence politique. Mozambique LNG est l’un des plus importants investissements étrangers jamais réalisés dans le pays, porteur de recettes fiscales considérables et d’emplois locaux. Mais il exige aussi de nouvelles garanties de stabilité et de gouvernance pour rassurer les investisseurs. Alors que Maputo examine la demande de prolongation, l’enjeu dépasse la simple question budgétaire : il s’agit de préserver la crédibilité du Mozambique sur la scène énergétique mondiale, tout en s’assurant que les bénéfices de ce méga-projet profitent durablement à son économie et à sa population.
